Un roman poignant, avec des messages forts, porteur d'espoir.

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Je voulais tout d'abord remercier Artémis Tanner pour m'avoir proposé son livre en SP via le site SimPlement. Ce roman est son premier et il a pu sortir grâce à un financement participatif sur Ulule.

J'en profite pour valider la catégorie n°4 (TITRE contient un caractère spécial (#,@,(), [],...) ) du Défi Lecture 2021. 

Attention, il y a plusieurs scènes de violence (rien de gore, je vous rassure) et tous les aveux des personnages ne sont pas toujours des plus faciles à lire. Âmes sensibles, vous voilà prévenues !

Avant de commencer ma chronique à proprement parler, je voudrais m'excuser de révéler des choses qui ne se trouvent pas dans le résumé (qui est par ailleurs bien fait : intriguant et mystérieux, il ne gâche pas la surprise) concernant Jared, mais il aurait été compliqué de construire quelque chose sans les mentionner. 

Concernant la couverture, je la trouve simple et sombre. Elle n'attire pas forcément l'œil, mais je trouve qu'elle résume bien la façon de vivre et la solitude du personnage principal.

Concernant la plume, je l'ai trouvée fluide et agréable, malgré l'omniprésence de la violence, tant physique que verbale et psychologique. Pour un premier roman, Artémis Tanner sait très bien jongler entre les périodes de réflexion de ses personnages, un peu d'action, beaucoup de pression psychologique et des révélations détonantes. 

Nous rentrons dans le quotidien de Sacha, alias Jared, jeune homme de 18 ans et anti-héros gothique, mal dans sa peau, acide et agressif dans ses paroles, très dur avec sa mère qui "l'étouffe avec son trop plein d'amour". Les seuls moments durant lesquels il se sent à peu près bien, ce sont ceux où il fuit la maison familiale, souvent pour se rendre à des fêtes organisées par Samuel, son meilleur et seul ami, où il consomme alcool et stupéfiants avec excès.

Vous allez peut-être penser avoir affaire à un gosse de riches qui a tout ce qu'il veut et qui part en cacahouète. Et bien non, pas du tout ! La famille de Sacha, pardon de Jared, est modeste mais, ce qui le détruit, ce sont ses parents. Ou plutôt la violence de son père sur sa mère et la passivité de celle-ci face aux coups qu'elle reçoit. Pour lui, ils lui ont gâché son enfance. C'est pourquoi il hait ses parents et, ce de fait, ce prénom qu'il lui ont donné et préfère se faire appeler par son deuxième prénom.
Ce qui, à mon sens est un peu paradoxal, étant donné qu'il vient aussi de ses parents. Quitte à se faire appeler autrement, autant choisir soi-même son prénom ou son surnom... Enfin bref, là n'est pas la question.

Un jour, lors d'une énième fête chez Samuel, il va faire la rencontre d'Opale. De prime abord, elle semble banale et timide, donc il la classe spontanément dans le panier des filles "pas intéressantes" (merci pour ce super cliché Jared !). Seulement, sa spontanéité et son ton jovial le surprennent et l'intriguent. Ils vont être amenés à se recroiser et son intérêt pour la jeune fille va s'accentuer.

A partir de ce jour-là, les vies de Jared, d'Opale et de Samuel vont changer, mais de nombreuses épreuves n'attendent qu'un faux pas pour les faire trébucher les laisser au sol, KO. Sauront-ils se relever de tous ces obstacles malgré le poids qu'ils portent déjà tous sur leurs jeunes épaules ?

J'ai trouvé la psychologie de ces personnages très forte, très travaillée, tous écorchés par la vie qu'ils sont. Surtout Opale et Jared, même si, à part en soirée, la première arrive à mieux le cacher. Il ne faut pas non plus oublier la pauvre Caroline qui, d'une certaine façon, est celle qui m'a le plus touchée. Elle s'en prend plein la figure, de tous les côtés, mais elle reste debout, difficilement, mais elle lutte tout de même à sa façon en gardant espoir.

On voit bien que Jared ne la comprend pas, mais il est vraiment particulièrement odieux avec elle.
Après le divorce de nos parents, mon frère et moi avons vécus des choses pas toujours faciles du fait de leurs nouveaux conjoints respectifs et, même si aujourd'hui je ne parle plus à mon père, j'ai conservé de très bonnes relations avec ma mère avec qui je suis très souvent en contact. Jamais je ne lui ai parlé ainsi à l'époque. Jamais !

L'auteure nous montre ici, entre autres, l'immense pouvoir de l'amour d'une mère pour son enfant, et tout ce qu'elle peut endurer pour lui. Bien que l'on puisse aussi assister à un tout autre genre de situation.

Quant à Gabriel, le père, c'est une espèce d'enflure de première, un lâche incapable d'affronter ses propres problèmes, ses propres démons qu'il noie dans l'alcool, et qui prend plaisir à frapper plus faible que lui. Un homme qui s'est détruit à petit feu lui-même et a détruit sa famille, son humanité, le transformant en démon empli de folie et de violence !

Je dois avouer qu'à un moment, j'ai eu peur de deviner vers quoi Artémis Tanner était en train de m'entraîner, une voie qui ne me plaisait guère, dans un certain sens. Mais, non seulement je me suis fourvoyée (heureusement), mais elle a aussi su m'emmener bien plus loin que tout ce à quoi j'avais bien pu penser.
Pour la fin, j'avais bien deviné, tout en passant à côté. lol Je vous laisse vous débrouiller avec ça. ;-)

Je vais terminer en parlant du titre, que je trouve vraiment bien pensé. Ce "o" entre parenthèses modifie le sens du mot selon si on le lit ou non. Mais ce n'est pas tout, je lui trouve un sens plus profond dans le sens où Jared vit selon ce qu'il voit. Le seul problème, c'est qu'il ne voit pas tout et donc, n'a pas toutes les données pour pleinement comprendre ce qu'il se passe réellement. Du coup, ce qu'il voit est tronqué et il vit d'une façon qui aurait pu être bien différente s'il avait vraiment vu. Comme quoi il ne faut pas uniquement se baser sur ce que l'on voit sans chercher à comprendre le fond des choses. Je ne sais pas si c'est un des messages que l'auteure a voulu faire passer, mais en tout cas, c'est comme ça que moi je l'ai ressenti. ;-)

En résumé, j'ai passé un bon moment entre les pages de ce livre, aux côtés de personnages que la vie n'a pas épargnés. Artémis Tanner a une plume fluide et agréable dont elle se sert avec aisance pour faire passer des messages forts sur des situations des plus difficiles, parfois tabous, et malheureusement toujours d'actualité (violence conjugale, violences psychologiques, alcoolisme, dépendance à la drogue, deuil...), tous en gardant des petites "surprises" qu'elle dissémine un peu tout le long du livre. J'ai vraiment apprécié la fin qui, sans vous en dire trop, apporte une note d'espoir.

          Pour le dévorer, c'est par ici ou par là.